lundi 20 janvier 2014

2014 sera-t-elle l'année de l’internet des choses ?


2014 sera-t-elle l'année de l’internet des choses ?

Publié le 13 janvier 2014
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 Crédit Reuters

Atlantico : Qu'est-ce que cela implique vraiment pour nous comme pour l'internet ? Faut-il voir là une basculement majeur dont on doit s'inquiéter ou une finalité prévisible ?

Bertrand Duperrin : Le fait que les objets connectés génèrent davantage de données que les humains est logique et prévisible. A partir du moment où l’on connecte les objets c’est une issue inéluctable. D’abord parce qu’un jour les objets seront aussi ou plus nombreux que nous. Ensuite, parce les objets sont en quelque sorte les « senseurs » de nos activités. Ils génèrent potentiellement des données en permanence sur leur utilisation, leur environnement « physique », leur localisation etc. In fine, il est logique qu’ils finissent un jour par générer davantage de données que nous.
L’enjeu majeur que cela pose d’un point de vue purement technique est de gérer cette masse croissance d’objets et l’afflux de données qui est son corollaire. Mais cela a été fait.
Quand à parler de basculement majeur je dirais « oui et non ». Non, car d’un point de vue strictement technique on a juste une augmentation du nombre d’émetteurs de données et du volume de données. La donnée n’est qu’une suite de 0 et de 1, objets et technologies ne valent qu’en fonction de ce qu’on leur demande, de ce qu’on en fait. Le basculement ne touche pas tant la dimension technique que les usages : que peut-on et va-t-on faire de ces données ? Internet a toujours eu pour vocation de connecter les gens pour partager l’information, en y ajoutant les objets on ne fait qu’ajouter des capteurs et des émetteurs nouveaux, il n’y a rien à en craindre. Par contre, c’est au niveau de la centralisation et de l’usage de ces données que se déplace l’enjeu, pas sur les objets eux mêmes. 
Finalement c’est à la fois une finalité prévisible qu’un basculement qu’on peut craindre si on laisse faire et n’importe quoi.

Cela veut-il dire que les humains perdent le contrôle du web ou simplement que nous y ajoutons des relais ?

L’objet connecté ne fait pas perdre le contrôle du web à l’humain. Au contraire, il renforce le périmètre de son champ d’action. Si perte de contrôle il y a elle est liée au traitement des données collectées et partagées par les objets et à la partie « décisionnel » qui lui est liée. L’objet n’est finalement qu’un terminal sans grande intelligence au bout d’une chaine. L’intelligence du système est au niveau de la récupération et du traitement des données et là il peut y avoir perte de contrôle. Pas par l’humain qui, in fine, est celui qui conçoit le dispositif en fonction de sa propre finalité, mais par l’utilisateur final qui va se retrouver face une à une boite noire qui va concentrer et traiter des données issues de ses objets et de ceux des autres. Il espère en retirer une valeur ajoutée, un service, mais on pense que le retour en vaudra la peine on ignore encore quelle sera l’étendue du prix à payer.

Beaucoup de gens s'inquiètent du développement de cet internet des objets pour de multiples raisons. Mais le "tout-internet" est-il vraiment pour demain, pour 2014 ? A quelle horizon peut-on imaginer la vie totalement connectée qui terrorise certains et fait fantasmer les autres ?

On est dans une logique exponentielle. Plus on avance en la matière plus on accélère, plus les objets prolifèrent et les usages se développent. Ce qui est était une chimère il y a trois ans est réalité aujourd’hui donc le "tout connecté" est proche. Sans envisager le 100% d’objets connectés, on peut arriver à une masse critique d’objets potentiellement connectés sur les usages essentiels d’ici moins de 5 ans. En tout cas dans les pays « avancés ». Je dis potentiellement connectés car, comme vous le mentionnez, cela ne va pas sans craintes, des craintes qui vont grandir au fur et à mesure que le phénomène se généralise. Il peut y avoir un certain fossé entre ce qui sera possible de fair et ce qui sera fait. On peut envisager une période transitoire avec des usages à deux vitesse, entre ceux qui s’engouffreront totalement dans la digitalisation et la connexion de leurs vies, objets et activités et ceux qui seront frileux et précautionneux. Mais à terme on peut se demander si on aura encore le choix. On peut même imaginer qu’une partie de ces objets soit imposée par les pouvoirs publics, les compagnies d’assurance voire ne puissent s’utiliser en mode déconnecté.

Il se dit notamment qu'il reste à résoudre pour l'internet des choses le défi du langage commun, qu'il lui "manque son HTML". Est-ce le seul défi qu'il reste à relever ? Sinon quels sont les autres ? 

C’est peut être un défi au niveau des objets eux même mais au final ça reste de la donnée. Donc pas le plus difficile à relever. Les deux grands défis seront plus systémiques.
D’abord, il s’agira de donner de l’intelligence au système. Connecter c’est bien mais pour quelle proposition de valeur ? Quels services ? Quels bénéfices à la fois pour les utilisateurs et les fournisseurs de technologies et services ? L’objet est le bout de la chaine, ce qui compte est son intégration dans un dispositif d’intelligence collective, une sorte de cerveau global ou de Big Brother selon la vision qu’on a des choses. Le premier enjeu sera donc du coté du décisionnel, business intelligence et cette notion aujourd’hui fourre-tout de Big Data.
Le second sera lié à la confiance qu’on met dans le système. Du cerveau global utile et servile à Big Brother la frontière est mince. Sans éthique de la part des opérateurs ni de régulations appropriées on peut voir monter la défiance des utilisateurs ou assister à un dévoiement total du système. Voire les deux.

Androïd apparaît comme un option viable pour uniformiser l'internet des choses. Peut-on tabler la dessus ? Quelles en seraient les conséquences pour les marchés interconnectés des équipements informatiques, des objets connectés, des fournisseurs d'accès etc. ?

On peut se demander s’il est souhaitable et même utile d’uniformiser les choses au niveau des périphériques. Le besoin de cohérence est sur les formats d’échange et le traitement des données. Le périphérique finalement est secondaire et doit le rester. On doit pouvoir connecter son objet à un « système » indépendamment de son système d’exploitation, de son fabricant sinon on perd des deux cotés. On perd du coté des utilisateurs qui doivent adapter en permanence leurs outils à une offre de service qu’on imagine évoluer rapidement et fréquemment, on perd également du coté des industriels qui en cas de marché fragmenté n’arriveront pas à atteindre une masse critique d’utilisateurs pour tirer quelque chose des données.

Plus généralement, quelles sont les opportunités économiques de l'Internet des choses ? S'agit-il d'un eldorado ou simplement d'une transformation technologique ? 

C’est plus une évolution qu’une transformation technologique. Par contre, sans parler d’eldorado, il y a un potentiel économique de premier ordre à deux niveaux. D’abord au niveau des objets eux-mêmes, avec un renouvellement des parcs à envisager dans un horizon très bref. On parle aussi bien d’objets communicants connus que d’objets de la vie de tous les jours, du chauffage à la cafetière. Ensuite, au niveau des prestataires de service. Quelle valeur, quel service proposer à l’utilisateur final une fois qu’on a les données des objets, qu’on peut les benchmarker avec ses propres usages et ceux de millions d’utilisateurs voire les corréler avec des facteurs extérieurs. Ici le potentiel est énorme mais les business models sont encore à inventer.
La limite du « web 2.0 » ou web participatif était justement lié à la participation active des utilisateurs. Les objets connectés en devenant les senseurs de tout ou partie de nos activités vont permettre la participation passive et ouvrir un nouveau champ des possibles. Avec tout le potentiel et les risques qui vont avec.

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  • Par ignace - 13/01/2014 - 15:49 - Signaler un abusclair comme une explication 2.0
    Ensuite, au niveau des prestataires de service. Quelle valeur, quel service proposer à l’utilisateur final une fois qu’on a les données des objets, qu’on peut les benchmarker avec ses propres usages et ceux de millions d’utilisateurs voire les corréler avec des facteurs extérieurs.

Information overload? Visual content is the answer


Information overload? Visual content is the answer

There's a gap between the information consumers want and what they're getting

The social, mobile Web has disrupted businesses in more ways than most people realize. It has impacted the expectations of our customers and our employees who expect social media-like experiences.  And it has changed the way we interact with internal and external communities to develop products, communicate to the marketplace, and win new customers.
According to the Corporate Executive Board, as much as 60 percent of the buyer journey is complete before prospects reach out to vendors in a business-to-business transaction. And when they do reach out, it is often for a contract and a price.
How can brands compete? By establishing relationships that build trust. Your buyers are looking for brands that know how to connect in a human and emotional way. In fact, the Corporate Executive Board’s latest report  shows that “emotional” marketing messages beat “promotional” ones by a factor of 2 to 1.
The bottom line: Talking about your products or “solution selling” is the quickest way to be shown the door in a selling situation. So how do you communicate to your potential customers?
informationeyeAccording to Nielsen, 27 million pieces of content are shared each day.  And Statistic Brain says that ouraverage attention span has dropped from 12 seconds in 2000 to 8 seconds—one second less than a goldfish!
We check our phones 150 times per day. We check our email 30 times an hour. And the amount of information in the world continues to double every 18 months.
All this available information and data is creating a battle for customer attention between brands, publishers, and each one of us who creates content. More importantly, it’s forcing businesses to think and act like publishers.
That is why “Content Marketing” is one of the biggest buzzwords in marketing. It requires businesses to create content that their customers actually want. Content that helps them. And it is such a hot term right now because it is one of the biggest gaps between the content marketers create and the information our customers are looking for.
That is why more than 90 percent of marketers are using content marketing, but only 42 percent rate their content marketing efforts as effective, according to a recent study.
If everyone is creating content, how does a business break through the noise? How do we reach our customers in a way that engages them?
Articles with images get 94 percent more views than those without. And posts with videos attract three times more inbound linksthan plain text posts.  A study by 3M showed that 90 percent of the information sent to the brain is visual, and visuals are processed 60,000 times faster than text.
And this holds up when you look at how the social world is evolving. The meteoric rise of sites like Vine, Instagram and Pinterest, as well as the efforts by Facebook and Twitter to add more visual elements to their platforms are simply following the trend that visual content is the best way to reach short-attention-span audiences in a world filled with so many content choices.
I recently asked my own social media followers “What was the best content of 2013?” All of the responses pointed to videos.
Now, let’s flip the conversation to one of the most hated of corporate tools: slides. You don’t often hear Slideshare mentioned as a top social network. But according to Comscore, Slideshare is used by business owners and business executives at a rate five times any other social network! Slideshare may be one of the biggest content marketing opportunities for brands.
http://www.economistgroup.com/leanback/channels/information-overload-visual-content-is-the-answer/ 

DANS LA TÊTE DE GRIGORI PERELMAN, GÉNIE DES MATHS


7 NOVEMBRE 2013  /  À LIRE, À VOIR ET À ÉCOUTER
DANS LA TÊTE DE GRIGORI PERELMAN, GÉNIE DES MATHS
Le livre de Masha Gessen sur PerelmanLe livre de Masha Gessen sur PerelmanQui est Grigori Perelman, le matheux de génie qui a prouvé la conjecture de Poincaré et refusé toutes les récompenses ? Une réponse très vraisemblable est donnée par un excellent livre:Dans la tête d’un génie, de Masha Gessen, 274 p, 19,50 €. Ed. Globe, l’école des loisirs, 2013.
Le lecteur y découvrira l'univers kafkaïen des maths soviétiques d'avant la pérestroïka de Gorbatchev où excellence et antisémitisme se mélangent. La détection par un "coach" pour le moins spécial d'un petit garçon élevé par une mère qui a sacrifié sa carrière scientifique pour lui. Sa formation dans le cadre de l'entraînement des petits génies des maths destinés à gagner les olympiades internationales. Son intégration compliquée dans le monde académique où des mentors vont s'occuper de lui, reconnaissant son potentiel malgré un comportement... spécial.
Grigori Perelman, au début des années 1990, semblait s'orienter vers une brillante carrière de mathématicien, à l'occasion de séjours payés dans différentes universités américaines prestigieuse et à l'Institut Courant de New-York, où plusieurs propositions d'embauche lui furent faites. Certes, il ne sacrifiait à aucun rite social conventionnel, semblait un peu trop mépriser la salle de bain... mais rien qui puisse rebuter le milieu, habitué à voir bien d'autres monuments des maths se balader en tongs durant l'hiver, afficher un air un peu débraillé, ou enlever systématiquement leurs chaussures dans les réunions. Bref, Perelman, de ce point de vue, faisait "normal", du moins banal au regard de bien d'autres individualités.
Puis, assez brusquement, il rentre à Saint Petersbourg, où il travaille à l'Institut Steklov, et ne donne plus de nouvelles. En 1996, il refuse le prix que la Société européenne de mathématiques veut lui remettre. Sans donner d'autres explications que "mon travail n'est pas achevé". En 2000, il a un échange de courriel très étrange avec Mike Anderson, qui travaille sur la conjecture de Poincaré à l'université Stony Brook. Puis, brusquement, le 12 novembre 2002, il envoie une série de courriels à une liste de mathématiciens bien précise: ceux qui sont capables de comprendre - avec un effort - l'article qu'il vient d'envoyer sur le serveur arXiv qui commence ainsi "Nous présentons une expression monotonique pour le flot de Ricci (sous forme de flot gradient), valable en toutes dimensions et sans aucune hypothèse sur la courbure.....". En trois articles, Perelman va tout simplement prouver la conjecture de géométrisation, qui englobe celle de Poincaré. En sept ans de travail solitaire, Perelman avait réussi là où plusieurs générations de mathématiciens s'était cassés les dents.
UN TYPE BIZARRE ET TRÈS BRILLANT
Mike Anderson, dans le mail qu'il envoie à plusieurs collègues pour entamer une discussion sur le travail de Perelman, le qualifie de "type bizarre et très brillant". Malgré une tentative maladroite d'un groupe chinois de s'attribuer la réussite - car dans ses articles Perelman prouve la conjecture... mais ne dit pas expliciement qu'il le fait, en gros il laisse au lecteur le soin de le constater - la communauté mathématique reconnaît son travail et sa réussite. Au point de lui attribuer une des quatre médailles Fields du congrès mondial de mathématiques de 2006. A leur grande surprise, Perelman la refuse, Grigori PerelmanGrigori Perelmanmalgré toutes les tentatives de conciliations, les propositions de la lui remettre en Russie... Puis, il refusera de même le million de dollars prévus par la l'Institut Clay pour la conjecture de Poincaré. Et annonce même qu'il ne veut plus faire de maths.
Peut-on expliquer sa trajectoire ? Masha Gessen propose un syndrome d'Asperger, une forme légère d'autisme, souvent associée à des performances intellectuelles élevées. Une hypothèse vraisemblable, même si seul un diagnostic médical pourrait la confirmer. Une hypothèse non surprenante, si l'on en croit Isabelle Soulière, psychologue québécoise (UQAM) qui signe dans le Pour la Science de novembre un article où elle avance "qu'environ 15 à 30% des personnes autistes présentent au moins une capacité spéciale. Cette fréquence élevée pourrait s'expliquer en partie par leur façon de se concentrer sur des intérêts particuliers: quand un tel intérêt, qui se traduit par une pratique incessante, se combien à une aptitude particulière, la capacité correspondante est portée à une niveau très élevé."
Par Sylvestre Huet, le 7 novembre 2013  http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2013/11/dans-la-t%C3%AAte-de-grigori-perelman-g%C3%A9nie-des-maths.html 

Internet : comment on communiquait il y a 18 ans


News

Internet : comment on communiquait il y a 18 ans

En 1995, quand on communiquait en ligne, c'est plutôt en 1400 signes qu'en 140. Et si on voulait être lu, mieux valait connaître les recommandations en vigueur. Petite plongée dans une époque peut-être révolue, pour le meilleur et/ou pour le pire.
Internet : comment on communiquait il y a 18 ans
Ce matin, j'aurais pu commencer par le Oppo N1 qui sort sous Cyanogenmod, ou encore le Jailbreak d'iOS 7, mais en faisant défiler ma timeline Facebook, je suis tombé là-dessus :
 
Un rappel des règles en vigueur pour communiquer en ligne en 1995 (attention pour ceux qui cliqueront, c'est du brutal), posté par un de mes contacts Facebook, de la même génération internet que moi : ceux qui ont mis les mains dedans à partir du milieu des années 90 (oui, 1990). Soit bientôt 20 ans. Soit presque (normalement) une majorité. Et comme d'habitude, ça a fait tilt. De la même manière qu'à chaque fois que nous en discutons, que ce soit entre dinosaures du web, ou avec ceux qui ont successivement débarqué, tout d'abord entre 2000 et 2005, puis à partir de 2010. Bref, un choc de trois générations à la mesure de la vitesse internet : la génération BBS / Netscape, la génération Google/Firefox, la génération Twitter-Facebook/applications-jmentapedubrowser.

C'était mieux avant... Vraiment ? 

J'ai de nombreuses fois tenté de remettre en perspective la façon dont nous accueillons les innovations high-tech et web d'aujourd'hui comparées à celles d'hier. Et on constate souvent que si les choses évoluent, les vieilles recettes changent finalement assez peu... Mais s'il y un domaine ou les outils et les innovations ont profondément changé le fond et la forme de nos communications, c'est bien le web. Tout y a concouru : les connexions, les machines, les outils. Le point n'est pas de dire si c'est "pire ou mieux qu'avant". Mais à l'heure où l'on voit des responsables publics censés être les gardiens d'une parole raisonnée permettant un débat constructif se comporter comme n'importe quel adolescent aux hormones en ébullition, réagissant à chaud et tweetant à tout-va sans aucun recul, et prenant plus soin à l'impact instantané de 140 signes bien tournés plutôt qu'au problème en question lui-même, on peut vraiment se poser la question.
Cette question, je me la pose souvent lorsque je retombe sur le document exhumé par mon contact Facebook ce matin. Du coup je suis allé rechercher sa version française, toujours bien en ligne. Elle témoigne de l'utopie de l'époque : construire un réseau d'échange et de confrontation d'idées, hors du cadre connu qui se résumait à un canal descendant : l'auteur vers le lecteur, et point-barre. Un réseau permettant non seulement à tous de s'exprimer, mais aussi d'interpeller les "faiseurs d'informations", et en plus ailleurs que dans leur propre maison bien confortable. Mais un réseau utilisé en toute connaissance de cause, avec des règles à respecter, des codes parfois très étroit. Voici une petite sélection, un "best-of", notamment en matière d'échanges d'e-mails (à comparer savoureusement avec l'usage des SMS et autres apps de chats aujourd'hui) et d'utilisation des groupes de discussion (archives chez Google notamment), à comparer également à ce que sont devenus Facebook ou Twitter.

Les règle d'utilisation du web... rappel nécessaire ?

On commencera par les recommandations d'utilisation générales, et cette introduction qui pourrait finalement tout résumer : "Dans l'histoire récente de l'Internet, le Réseau a explosé avec de nouveaux et divers services d'information. Gopher, Wais, World Wide Web (WWW), Multi-User Dimensions (MUD), Multi-User Dimensions qui sont Orientés Objet (MOO) sont quelques uns de ces nouveaux espaces. Bien que la possibilité de trouver de l'information croît de manière explosive, "Caveat Emptor" reste de rigueur"(...). Oui, ça utilisait des locutions latines dans les recos internet (comme dans Star Trek, d'ailleurs).
  •  Souvenez-vous que tous ces services appartiennent à quelqu'un d'autre. Les gens qui paient les factures établissent les règles qui en régissent l'usage. L'information peut être libre - ou peut ne pas l'être ! Vérifiez bien. Point assez savoureux en ce moment...
  • Si vous avez un quelconque problème avec toute forme de service d'information, commencez par résoudre le problème en vérifiant localement : vérifiez les fichiers de configuration, les paramètres du logiciel, les connexions réseau, etc. Faites cela avant de supposer que le problème est du côté et/ou de la faute du fournisseur. Oui, à l'époque, on mettait les mains dans le cambouis... Peut-être aussi parce qu'on le pouvait.
  • Soyez conscient des conventions utilisée pour fournir de l'information au cours des sessions. Les sites FTP ont généralement, au sommet des répertoires, des fichiers appelés README et qui contiennent de l'information à propos des fichiers disponibles. Mais ne supposez pas que ces fichiers sont nécessairement bien à jour et/ou exacts. Le meilleur moyen de reconnaître un vieux schnock de l'internet : il lit le README.
  • Ne supposez qu'aucune information que vous trouvez est à jour et/ou exacte. Souvenez-vous que les nouvelles techniques permettent juste à n'importe qui de devenir un éditeur, mais tout le monde n'a pas découvert les responsabilités liées à la publication. No comment.
  • Souvenez-vous que, à moins d'être sûr qu'une technique de sécurité et d'authentification est utilisée, toute information que vous soumettez à un système est transmise "en clair" sur l'Internet, sans protection contre les "renifleurs" ou faussaires.
  • Comme l'Internet embrasse le globe, souvenez-vous que les services d'information peuvent refléter des cultures et styles de vie franchement différents de ceux de votre communauté. Des choses que vous trouvez choquantes peuvent provenir de régions où elles sont acceptables. Restez sans parti pris.
Je terminerai avec celui-ci, assez hallucinant aujourd'hui : "Tenez compte de l'étalement de la charge des systèmes sur les sites célèbres, en évitant les heures de pointe et en vous connectant en période creuse."

Le Chat était tout sauf lol

À cette époque, pas de Twitter, Kik, et autres services de discussion privées ou publiques, il y avait des logiciels tels que ICQ : que des outils bien rugueux à la prise en main. Reste que leur définition est toujours à peu près d'actualité, en revanche, leurs règles un peu moins...  "Talk est un ensemble de protocoles qui permet à deux personnes de tenir un dialogue interactif via ordinateurs."
  • Utilisez des majuscules et minuscules, et une ponctuation appropriée, tout comme si vous tapiez une lettre ou envoyiez du courrier électronique.
  • Dites toujours un au revoir ou autre adieu, et attendez de voir l'adieu de l'autre personne, avant de terminer la session. Ceci est particulièrement important lorsque vous êtes en communication avec quelqu'un depuis longtemps. Souvenez-vous que votre communication dépend à la fois de la bande passante (la taille du tuyau) et du délai (la vitesse de la lumière). Note aux plus jeunes : à cette époque, la consommation internet était facturée à la minute en France, sisi...
  • Les raisons pour ne pas recevoir de réponse sont nombreuses. Ne supposez pas que tout fonctionne correctement. Toutes les versions de talk ne sont pas compatibles.
  • Talk laisse paraître votre habilité de dactylo. Si vous tapez lentement et faites des fautes de frappe, cela ne vaut souvent pas la peine d'essayer de corriger, vu que l'autre personne pourra en général voir ce que vous voulez dire.
  • Soyez prudent si vous tenez plusieurs sessions talk en même temps !

Groupes de discussion : il valait mieux réfléchir avant de toucher à son clavier

Les groupes de discussion sont un peu l'ancêtre de Facebook, finalement. On venaient y débattre, vendre ses vieilleries, râler contre le système, s'engueuler avec élégance (souvent, mais parfois sans). Les groupes étaient hiérarchisés par thèmes, un peu comme le sont les pages Facebook aujourd'hui, on s'y abonnait, on lisait, on réagissait. En y repensant d'ailleurs, elles étaient sans publicité... Quoi qu'il en soit, les recommandations de l'époque résonnent étrangement aujourd'hui.
Le préambule est assez étonnant à relire aujourd'hui : "Chaque fois que vous vous engagez dans la communication d'une personne à plusieurs, toutes les règles relatives au courrier sont d'application aussi. Après tout, communiquer avec plusieurs personnes via le courrier électronique ou en postant, est assez semblable à communiquer avec une personne, avec l'exception qu'il est possible d'offenser un bien plus grand nombre de gens qu'avec la communication de personne à personne. Il est donc fort important d'en savoir autant que possible à propos de l'audience de votre message." 
  • Lisez tant les listes de distribution que les groupes de Nouvelles pendant un ou deux mois, avant d'y câbler ou poster quelque chose. Cela vous aidera à acquérir une compréhension de la culture du groupe.
  • Ne reprochez pas au gestionnaire du système, le comportement des utilisateurs.
  • Tenez compte qu'une large audience va voir ce que vous postez. Cela peut comprendre votre chef actuel ou futur. Faites attention à ce que vous écrivez. Souvenez-vous aussi que les listes de distribution et les groupes de Nouvelles sont souvent archivés et que vos mots peuvent être stockés pour très longtemps, à un endroit où beaucoup de gens ont accès.
  • Considérez que les personnes parlent pour elles-mêmes et que ce qu'elles disent ne représente pas leur institution (sauf mention explicite).
  • Les messages et articles seront brefs et ciblés. Ne vagabondez pas hors sujet, ne divaguez pas et ne câblez, ni postez simplement pour faire remarquer les fautes de frappe ou d'orthographe des autres. Cela, plus que tout autre comportement, vous signale comme débutant puéril.
  • La falsification et la mystification ne sont pas admis comme comportement.
  • La publicité est bienvenue sur certains listes et groupes de Nouvelles, et exécrée sur d'autres ! Ceci est un autre exemple de connaissance de votre audience avant de poster. De la publicité non demandée et complètement hors sujet va plus que certainement vous garantir une bordée de messages haineux.
  • Si vous envoyez une réponse à un message ou un article, veillez à résumer l'original au début du message ou à inclure juste assez du texte original pour donner le contexte. Ceci donnera la garantie que les lecteurs comprennent lorsqu'ils commencent à lire votre réponse. Comme les Nouvelles, en particulier, sont propagées par distribution des articles d'un relais à l'autre, il est possible de voir une réponse à un message, avant de voir l'original. Donner le contexte aide tout le monde. Mais ne mettez pas le texte original en entier !
  • Si vous deviez vous trouver en désaccord avec une personne, faites vos réponses à chacun des autres par courrier plutôt que de continuer à envoyer des messages à la liste ou au groupe. Si vous débattez d'un point pour lequel le groupe peut avoir un intérêt, vous pouvez résumez plus tard pour tous.
  • Ne vous impliquez pas dans des guerres incendiaires. Ne postez, ni répondez aux matières inflammables.
  • Evitez d'envoyer des messages ou de poster des articles qui ne sont rien de plus que des réponses gratuites à des réponses.
  • Il y a des groupes de Nouvelles et des listes de distribution où on discute de sujets d'intérêts très larges et divers. Cela représente une variété de styles de vie, de religions et de cultures. Il n'est pas admis de poster des articles ou envoyer des messages à un groupe dont le point de vue vous choque, simplement pour dire qu'il vous choque. Des messages tenant du harcèlement sexuel ou racial peuvent aussi avoir des implications légales. Il existe du logiciel capable de filtrer les éléments que vous pourriez trouver choquants. 

Est-ce qu'on a fait d'internet un sale gosse ?

Alors qu'aujourd'hui l'instantanéité est la norme, le recul une aberration, qu'on like des pages de soutien, retweete des liens sans parfois même les avoir ouverts, que même Warhol se retournerait la paille dans le nez on constatant que son quart d'heure de célébrité est devenue une éternité, et qu'on a finalement recréé 20 ans après quasiment la même chose : quelques voix qui occupent le terrain, beaucoup de commentateurs inaudibles et versant parfois dans la frustration, ces règles d'un autre âge posent quelques questions et forcent à nous interroger individuellement sur ce que nous faisons de ce réseau et des ces outils. Il n'y a pas de réponse absolue, on y trouve des merveilles comme des torrents de boue, il permet de libérer des paroles et faire circuler des informations à ceux qui ne le pouvaient il y a encore quelques années, comme il permet de déverser des insanités en toute impunité. Et pourtant, déjà à l'époque, ça "clashait" sévèrement, ça terminait au tribunal (attention, ce lien peut vous cramer votre après-midi). La différence (autant que je m'en souvienne), c'est que ça ne faisait pas 10 articles répétant tous la même chose sur le sujet dans la journée. Et c'était peut-être mieux comme ça. 
En tous cas, en relisant ces règles, je me suis posé la question : est-ce que tout ce que j'ai tweeté, liké, partagé, commenté cette année était digne d'intérêt ? Ma réponse est non. Est-ce que parfois j'aurais dû attendre, voire m'abstenir ? Ma réponse est oui. Est-ce que relire ces règles du début de l'internet grand public en France est une bonne chose ? Ma réponse serait plutôt oui. Est-ce qu'on fait fausse route ? Rendez-vous en 2023.
P.S. Merci Philippe pour la ballade en amnésie.
http://www.cnetfrance.fr/news/internet-comment-on-communiquait-il-y-a-18-ans-39796544.htm#xtor=RSS-300021