lundi 14 janvier 2013

Internet: Quelles conséquences après le suicide d'Aaron Swartz?



Internet: Quelles conséquences après le suicide d'Aaron Swartz?

Créé le 14/01/2013 à 17h07 -- Mis à jour le 14/01/2013 à 17h17



WEB - Des centaines de scientifiques diffusent leurs articles gratuitement depuis le suicide du jeune homme de 26 ans, figure du militantisme en faveur du libre partage des connaissances et de l'information sur Internet...

Pour la famille de l’«hacktiviste» Aaron Swartz, cela ne fait aucun doute. Si les raisons de son geste restent pour l’heure un mystère, ses proches ont immédiatement établi un lien entre son suicide vendredi à Brooklyn et ses démêlés judiciaires. Le jeune homme de 26 ans souffrait de dépression. Mais l’élément qui est mis en avant depuis sa disparition est son inculpation en juillet 2011 de fraude électronique et fraude par ordinateur pour avoir dérobé des millions de pages d'archives numérisées du Massachusetts Institute of Technology (MIT) hébergées dans la base de données JSTOR. Son procès devait débuter en avril et il risquait jusqu'à 35 ans de prison, ainsi qu’une amende d'un million de dollars.

Aaron Swartz avait piraté cette base de publications universitaires il y a plusieurs d’années dans le but de les rendre accessibles au plus grand nombre. Le jeune homme était un chantre de la libération de l’accès aux œuvres et au savoir. «Le patrimoine scientifique et culturel de l'humanité tout entière publié au cours des siècles dans des livres et des journaux est de plus en plus numérisé et mis sous clef par une poignée d'entreprises privées: le partage [de fichiers] n'est pas immoral, c'est au contraire un impératif moral», écrivait-il en 2008. Aaron Swartz avait participé à la création du format RSS, soutenu le lancement des licences libres Creative Commons qui ont permis une explosion de la culture libre sur Internet, co-fondé le site Web communautaire Reddit, et s’était battu contre les projets de loi Sopa et Pipa aux Etats-Unis.

Une «campagne PDF» sur Twitter

La mort d'Aaron Swartz a attisé le débat sur le libre partage des données. En réaction à son suicide, un universitaire nommé Micah Allen spécialisé en sciences cognitives a lancé le hashtag #pdftribute sur le réseau social Twitter et a enjoint ses confrères, dans le cadre d'une «campagne PDF», à mettre en ligne leurs publications de manière gratuite. Plusieurs centaines de scientifiques du monde entier ont suivi le mouvement depuis dimanche soir en diffusant leurs articles en libre accès. Il est possible de les consulter à l’adresse pdftribute.net. «Ce PDF Tribute participe à une prise de conscience globale qui doit perdurer. La connaissance doit être partagée», réagit Jérémie Zimmermann, co-fondateur de la Quadrature du Net, ému par la disparition d’Aaron Swartz.

«Les éditeurs de publications scientifiques sont une bande d’escrocs dont il faut se débarrasser. Ils engrangent des profils colossaux sans rien reverser aux chercheurs» qui, paradoxalement, doivent «être publiés pour devenir être reconnus», dénonce-t-il. Il espère que le public comprend aujourd’hui «l’importance de ces enjeux».

«Un enjeu fondamental pour le futur de notre société» 

«L’accès au partage de la connaissance est un enjeu fondamental pour le futur de notre société. Il y a un problème grave avec les entreprises qui privatisent la connaissance, estime Jérémie Zimmermann. Que ce soit dans le domaine culturel, des technologies ou scientifique.» Mais il reste positif: «Cette même année 2012, on a vu se faire rejeter les lois Sopa et Pipa poussées par Hollywood aux Etats-Unis. Aaron avait d’ailleurs joué un rôle dans ce combat. On a aussi gagné contre Acta. C’était totalement inespéré. On a fait un bond. Les choses évoluent lentement grâce à la somme d’actions individuelles.»

Jérémie Zimmermann souligne aussi que la base de données JSTOR  du MIT a fini par proposer des articles en accès gratuit il y a quelques semaines. Mille deux cents exactement, à raison de trois téléchargements toutes les deux semaines. «Ce serait la suite logique» que d’autres sites lui emboîtent le pas, affirme-t-il, avant d’ajouter: «J’ose espérer qu’il n’y a pas eu besoin qu’Aaron se suicide» pour que l’édition scientifique «aille dans ce sens».

— Anaëlle Grondin
    (http://www.20minutes.fr/web/1079609-internet-consequences-apres-suicide-aaron-swartz) 

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